Caennais d’origine, Jean-Pierre LE FÈVRE a été formé à l’École des Beaux-Arts de la ville, et décide de s’installer à Saint-Lô en 1973. Son parcours artistique est profondément marqué en 1977 par la rencontre fructueuse et déterminante avec le peintre expressionniste Jef Friboulet, dont l’œuvre, empreinte d’un humanisme profond, séduit Jean-Pierre LE FÈVRE et va définitivement marquer sa création. Il expose régulièrement en Normandie, et participe à de prestigieux salons nationaux et internationaux. Fort d’une riche carrière ponctuée de prix et de distinctions, l’artiste peut être fier de voir nombre de ses tableaux figurer aujourd’hui non seulement dans des collections privées, mais également dans des musées français et étrangers.
À l’instar de Jean-François Millet, dont le réalisme et la noblesse des scènes rurales dépeignant la condition paysanne de la seconde moitié du XIXe siècle a profondément marqué son temps, Jean-Pierre LE FÈVRE se plaît à peindre, dans des scènes villageoises ou citadines saisies au vol, ou dans des intérieurs plus intimistes, des gens simples pratiquant des petits métiers, des pêcheurs laborieux, ou des nus féminins très touchants. Les tableaux au style bien affirmé révèlent à la fois l’indépendance d'esprit et la vision humaniste de leur auteur, qualités rares aujourd’hui dans la peinture contemporaine plus soucieuse d’interpeller ou de défier le spectateur que de l’émouvoir. Ce monde humble apparaît sous un dessin incisif et précis très cézanien, mais néanmoins fluide et habilement fondu dans des compositions épurées, toujours très structurées, qu’aucun détail superflu ne vient jamais troubler. Les modèles bien charpentés et parfaitement étudiés semblent concentrer sur eux la lumière d’une palette riche et chaleureuse, capable de mettre en valeur la quintessence du sujet ainsi métamorphosé.
De l’œuvre de Jean-Pierre LE FÈVRE, dont l’authenticité et l’inclination pour la figure humaine n’a pas fini de surprendre, il reste gravé en nous cette impression que le peintre est parvenu, par son réalisme très personnel, à dévoiler tout simplement l’essence humaine. Une poésie simple, tendre et sincère de la vie ordinaire réhabilitée avec puissance dans son émouvante vérité.
Francine BUNEL-MALRAS, Historienne de l’art
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Né
à Caen où il étudia
à l’école des Beaux
Arts de 1949 à 1953 sous la direction
de LE GARRIDO, Jean Pierre LE FEVRE nommé
éducateur au C.D.E. de Canteleu près
de Rouen, y fit la connaissance du président
SIEBERT et des artistes de la Palette Cantilienne,
sans oublier d’enrichissantes rencontres
avec Albert MALET.
C’est
en 1973 qu’il s’établit
à Saint-Lô et affirma plus
encore, la singularité de son talent
après avoir découvert la personnalité
de Jef FRIBOULET en son atelier de Fécamp,
et d’entamer son brillant cheminement
au sein du monde artistique national et
international.
Dessinateur
exceptionnel, Jean Pierre LE FEVRE s’est
imposé comme l’un des plus
brillants peintres Bas-Normands, à
la fois sympathique, clairvoyant et discret,
se mettant totalement au service des êtres
simples et de la généreuse
nature qu’il définit grâce
à sa palette chaleureuse et audacieuse,
dont les transparences font vibrer plus
encore sa maîtrise de l’authenticité
ponctuée d’une poésie
graphique pleine de saveurs.
André
RUELLAN, critique d'art
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Il y a dans chaque tableau une
petite porte à franchir
De
facture expressionniste, mais sans véhémence
excessive, la peinture de J.P Le Fevre est
dénuée de maniérisme.
Elle s'attache à transmettre un certain
sentiment de l'homme penché sur son
labeur ou laissant dériver son cœur
vers l'infini. Le peintre aime les lignes
fuyantes et les diagonales : /« II
y a une petite porte dans chaque tableau.
Il faut que vous la poussiez et que vous
entriez… Une peinture doit donner
accès à une certaine profondeur.
Si l'on se contente de peindre pour la simple
surface d'une œuvre, mieux vaut faire
autre chose. »
Ce
qui émeut J.P Le Fevre, c'est l'aptitude,
si rare, de certains peintres à conserver
leur âme et leur regard d'enfant,
comme Chagall ou Toffoli (…)
Ayant
croisé César, Belmondo, Mac
Avoye, sur sa route, Il n'hésite
pas à évoquer leur force peu
commune. « Avec des gens de cette
trempe, on a l'impression de recevoir quelque
chose d'unique et d'irremplaçable
».(…)
Enfin,
et bien qu'il déteste les citations,
J.P Le Fevre revendique celle-ci :
« L'enfant n'est pas un vase que l'on
remplit. C'est un feu qu'on allume ».
Puissent tous les pédagogues entendre
et faire leur cette formule ! Notre monde
s'en porterait mieux.
Luis
PORQUET, critique d'art
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De la glaise aux étoiles
Peindre
est une manière de résister
au désespoir, un geste de fraternité
offert au genre humain, en dépit
des malheurs dont il peut se rendre coupable
ou devenir lui-même victime. Chez
Jean-Pierre LE FEVRE, l'amour de l'homme
devient palpable dès qu'il nous parle
de son art, et s'il peint ses semblables
les deux pieds dans la glaise, c'est pour
mieux les aider à relever la tête,
faisant luire dans leur regard l'éclat
vacillant des étoiles. «
Je suis attiré par la lumière,
avoue-t-il. J'ai la faiblesse de croire
que je peux exprimer quelque chose de noble
et de beau. L'artiste n'est pas là
pour alourdir la peine et la douleur du
monde. Mon rêve secret serait de pouvoir
pénétrer dans l'une de mes
toiles. » Cela ressemble un peu
à un fameux conte chinois...
Il
nous est difficile d'imaginer un peintre
qui serait dépourvu d'amour, qui
ne se sentirait pas proche de ses semblables.
La générosité, chez
un artiste, nous paraît en effet une
qualité première, essentielle,
majeure. Elle consiste à donner à
l'autre la part de lumière qui lui
manque, non pas de prétendre le guider,
mais de l'accompagner dans l'humble effort
de chaque jour. Aux antipodes des peintres
de plaisance et des besogneux du pinceau,
Jean-Pierre LE FEVRE est un homme préoccupé
de ses semblables. Le regard qu'il porte
sur les autres est toujours empli de compassion.
S'il s'intéresse au paysage, c'est
davantage à titre de support, à
la manière d'un scénographe
mettant son talent au service de la dramaturgie
de l'oeuvre. Car c'est l'humain qui l'intéresse.
Et l'on n'est jamais trop humain, quoi qu'en
ait dit un philosophe, fût-il génial
!
Si
vous demandez à Jean-Pierre LE FEVRE
s'il est passé par les Beaux-Arts,
il vous répondra « Oui, hélas
! J'y ai beaucoup appris, mais je me suis
souvent vu mettre à la porte du cours.
Je m'occupais bien davantage des filles
que de mon boulot mais j'étais toujours
là dès qu'il s'agissait de
jouer un mauvais tour aux professeurs. J'étais
déconneur, mais pas meneur. A l'époque,
j'ai dû me taper le fameux Voltaire
de Houdon et tous les travaux imposés
aux apprentis que nous étions. La
technique alors était incontournable.
Et puis, un jour, j'ai tout abandonné.
Je me sentais vraiment prisonnier du dessin.
Et je le suis toujours... C'est un plaisir,
mais ça m'encombre. Je structure
d'abord ma toile, puis je la recouvre de
peinture en m'efforçant autant que
possible de lutter contre le détail.
» Un beau jour, cependant (c'était
en 1977), Jean-Pierre LE FEVRE est amené
à travailler huit jours auprès
du peintre Jef FRIBOULET dans le domaine
du monotype. Il semble bien que ce fut une
sorte de révélation. A l'époque,
Friboulet, habitait encore Fécamp.
La dimension de l'homme et son grand cœur
marquèrent Jean-Pierre pour la vie.
Plus tard, le maître d'Yport lui rendra
à son tour un hommage plutôt
touchant : « De ce réalisme
sensuel qui fut la marque de la peinture
figurative dès le XIXème siècle,
tu tires aujourd'hui la saveur des choses
et des gens que le XXème siècle,
pressé et stressé, ne parvient
plus à nous faire saisir. Et cela
nous fait du bien à un moment où
l'art se perd souvent dans les idées
et les formalismes obscurs. »
De
facture expressionniste, mais sans véhémence
excessive, la peinture de LE FEVRE est dénuée
de maniérisme. Elle s'attache à
transmettre un certain sentiment de l'homme
penché sur son labeur ou laissant
dériver son cœur vers l'infini.
Jean-Pierre aime les lignes fuyantes, les
diagonales : « II y a une petite porte
dans chaque tableau. Il faut que vous la
poussiez et que vous entriez dedans. Une
peinture doit donner accès à
une certaine profondeur. Si l'on se contente
de peindre pour la simple surface d'une
œuvre, mieux vaut faire autre chose.
» Ce qui émeut LE FEVRE, c'est
l'aptitude, si rare, de certains peintres
à conserver leur âme et leur
regard d'enfant, comme Chagall ou Toffoli,
dit-il. Ce sens même de l'émerveillement,
sans doute l'a-t-il aussi retrouvé
chez Jansem et Yankel, deux grands maîtres
de l'art moderne ou chez le rouennais Fritz-Villars.
Ayant croisé César, Belmondo,
Mac Avoye sur sa route, LE FEVRE n'hésite
pas à évoquer leur force peu
commune. « Avec des gens de cette
trempe, on a l'impression de recevoir quelque
chose d'unique et d'irremplaçable.
De surcroît, le peintre aime les gens
qui arborent une vie un peu turbulente .
C'est tellement intéressant, poursuit-il.
Ceux qui ne font pas de conneries sont,
à mes yeux suspects. J'aurais tendance
à m'en méfier. »
conclut-il dans un grand rire.
Rescapé
des bombardements au cours de la Seconde
Guerre Mondiale, Jean-Pierre LE FEVRE doit
la vie à une concession perpétuelle
qui se trouvait dans le cimetière
attenant à l'école toute proche.
A la suite d'une alerte aérienne,
pas moins de 35 personnes se trouvaient
réfugiées dans la cave du
cimetière. A cette époque,
le petit Jean-Pierre avait pris l'habitude
de dormir sous un billard. Peu après
l'attaque aérienne, il constata qu'un
immense trou occupait la place où
aurait dû reposer sa tête. Ce
petit miracle a fait de lui une sorte de
« sursitaire » qui,
en dépit de ses galères, a
toujours su garder un certain esprit de
partage. Dans la « Dialogue entre
les oiseaux et les hommes »,
« Le porteur d'eau »,
« L'escalier aux poteries »
ou cette grande scène de plage où
des jeunes filles nues côtoient des
femmes en deuil, il nous donne la mesure
du souffle qui le porte : un mélange
de tristesse et de ce qu'il appelle sa «
petite zone d'espoir ». Sa technique
du bristol marouflé sur bois, qui
a recours à la colle de peau de lapin
(procédé connu des anciens),
produit des effets stupéfiants. Le
motif est tendu comme la peau d'un tambour.
Bien
qu'il déteste les citations, Jean-Pierre
LE FEVRE revendique celle-ci : « L'enfant
n'est pas un vase que l'on remplit. C'est
un feu qu'on allume ». Puissent
tous les pédagogues entendre et faire
leur cette formule ! Notre monde s'en porterait
mieux.
Luis
PORQUET
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